Les bisous

Publié le par club rando

Du haut de son socle la statue de Marianne, symbole de la République Française, regarde tristement les centaines de bouquets de fleurs flétries qui s’amoncellent à ses pieds. Depuis un mois, le monument s’est improvisé mémorial pour rendre hommage aux victimes des récents attentats de Paris. C’est tout près de la Place de la République que va se tenir le dernier rendez-vous de l’année. Séquence sacralisée qui ouvre l’avenir, la présentation du nouveau programme est maintenant un rite bien établi. Suivant un cheminement dicté par le relief, les petites rues du 11° arrondissement s’élèvent doucement vers les hauteurs de Belleville. Largement ouvert aux lieux de festivité et de restauration, ce n’est plus le quartier populaire qu’il a été. Près du métro Goncourt, le restaurant qui abrite la rencontre se nomme «le Muxu». En basque, cela veut dire «le bisou».

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Son accueil sympathique et surtout sa cuisine, réputée inventive et généreuse, mérite qu’on tende l’autre joue pour reprendre un second.bisou. L’agencement de la salle (murs gris, chaises noires et suspension jaune poussin) fait plus dans le moderne que dans le régional. La touche sud-ouest reste très discrète. Ici, on ne s’affiche pas ostensiblement identitaire.

Les bisous

Les invités apprécient de se retrouver, de bavarder librement. Puis chacun prend place selon ses affinités. Les serveurs s’éclipsent poliment pour laisser la réunion débuter. Le silence qui autorise la prise de parole est un petit peu long à obtenir. Lorsqu’il s’installe, l‘orateur n’aura pas à trop forcer la voix grâce à une sonorisation qui permet de se tenir plus en retrait. L’animateur connaît bien le but du jeu. Il doit s’efforcer de séduire et de créer une envie partagée. Après une introduction convenue, il ne peut plus se dérober et se lance dans la description attendue. Le rythme est soutenu. S’il se permet quelques périodes de latence, c’est juste pour appuyer l’originalité de l’un des projets présentés.

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L’assistance écoute avec attention.Le fait qu’elle se soit déplacée en nombre témoigne d’une élégante courtoisie et d’une estime favorable. Mais la salle se doit d’être vigilante. A un moment, planent des interrogations. Des dates doivent être reprécisées puis vérifiées dans leur positionnement sur le calendrier. L’orateur hésite puis maintient sa première assertion. Il vient de mesurer la fragilité d’une atmosphère qu’il pensait déjà acquise. A l’énoncé de propositions qui paraissent novatrices, certains auditeurs dodelinent de la tête. D’autres affirment au contraire une mine réjouie. Les plus soupçonneux tapotent fébrilement sur leur ipod pour vérifier une information, puis sourient après confirmation de cette connivence virtuelle. L’invitation aux voyages se clôt à l’heure programmée.

Les bisous
Les bisous
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Les projections dans l’avenir deviennent de plus en plus complexes, même pour des personnes censées être libres de leur temps. Mais cette fois-ci encore, dans un élan généreux, l’assemblée protectrice et confiante va donner quitus au programme présenté. On peut donc passer à table. Le repas attendu a sonné juste. Les assiettes se sont parées de jolis tableaux de couleurs et de saveurs qui ajoutent au plaisir de se trouver là.

Les bisousLes bisous

Après ce moment agréable vient temps de se quitter. Chacun a gagné le droit d’abandonner un instant sa part de pudeur. Sur le seuil, le premier à le faire prend l’initiative d’enlacer son voisin pour lui souhaiter la bonne année. Les femmes claquent des bises avec bienveillance et évoquent le plaisir de se retrouver bientôt. Ces quelques minutes d’affectueuse complicité donnent un peu d’allégresse à l’air frais du dehors. Il n’y a plus qu’à refermer la porte !

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